Je me suis souvent demandé ce qui fait que certain chefs de projet sont considérés comme des gestionnaires de projet alors que d'autres sont immédiatement reconnus comme possédant une véritable dimension de leader. Les plus brillants des chefs de projets possèdent de nombreuses qualités qui en font des leaders exceptionnels. La première est la capacité de savoir communiquer une vision claire du projet à toutes les parties prenantes.


Pour communiquer une vision claire, il faut :

  • Avoir une vision claire
  • Bien comprendre les objectifs et les synthétiser pour rester simple et très concis
  • Décliner la vision pour chacun

Avoir une vision claire


Comment communiquer clairement si l'on n'a pas soi-même une vision très claire du projet ? Le chef de projet doit donc passer du temps avec son sponsor et les parties prenantes clés. L’objectif est de s’approprier le plus possible les différentes attentes des personnes rencontrées, de bien comprendre avec le sponsor les raisons pour lesquelles le projet est entrepris et les résultats escomptés.


Bien comprendre les objectifs et les synthétiser pour rester simple et très concis


Il est donc critique de réussir à bien intégrer l'ensemble des objectifs du projet: financiers, business, métiers, techniques, humains, processus, stratégiques, tactiques…
Cet exercice est à la fois complexe et nécessaire. En effet, tant que l'on ne comprend pas dans le détail les objectifs du projet, comment les synthétiser et les communiquer de manière simple et compréhensible.


Décliner la vision pour chacun


De plus, la communication de la vision doit être adaptée à chacun de ses interlocuteurs:
  • l'équipe réalisatrice et technique,
  • les futurs utilisateurs des livrables du projet,
  • les sponsors et
  • autres partie prenantes,
  • etc.

Plus facile à dire qu'à faire…


Pourtant nous l’avons déjà vu être exécuté avec virtuosité sur plusieurs projets et complètement raté sur d'autres.

L'un de ces succès était un projet de déploiement d’un ERP, système intégré financier et logistique. La vision synthétique était que ce projet allait permettre à l'ensemble de la compagnie de partager une vérité unique sur ses comptes dans le monde entier, à tous les niveaux hiérarchiques, et pour chacune des filiales géographiques, par divisions métier et par lignes de produit.

Les déclinaisons par type d'interlocuteur de cette vision projet intégraient ce cœur de message et y ajoutaient les messages spécifiques selon les interlocuteurs:
  • Pour les techniciens, l'aspect migration vers un progiciel de renom du marché qui allait ajouter de la valeur à leur expérience et les tenir en pointe des meilleures solutions technologiques.
  • Pour les financiers, une consolidation centralisée et unifiée dans une base de données commune accompagnée de l'adoption des meilleurs processus dans l'ensemble des organisations financières des filiales de cette entreprise dans le monde. La possibilité de mieux gérer facturation et comptabilité fournisseur pour améliorer le cash flow.
  • Pour les décideurs, les tableaux de bord contenant des chiffres indisputables, l'accès aux données à travers des outils de construction de requêtes et rapports.
  • Pour les utilisateurs, des formations, une interface homogène, ergonomique, fonctionnelle et des processus documentés en ligne.
  • Pour les clients, une facturation irréprochable.
  • Pour les fournisseurs, une gestion et un règlement de leurs factures corrects et prédictibles.
Ceci aboutit à un projet réussi en un temps record et qui délivra au-delà des objectifs escomptés en s’adaptant aux retours des utilisateurs en particulier dans le domaine des rapports que le management pouvait obtenir du nouveau système.

Le second exemple auquel je pense est en fait un contre-exemple. L’objectif était de déployer un système d’assignation automatique des techniciens pour des interventions de réparation sur des équipements électroniques. La vision synthétique semblait claire: la solution, en optimisant les temps de trajet des techniciens, va accroitre la satisfaction des clients et la productivité.

Cependant, le message ne fut pas décliné en fonction des différentes populations impactées et certaines parties prenantes furent même totalement oubliées…

Le message retenu par les techniciens sur le terrain fut uniquement la partie amélioration de productivité. Celle-ci fut rapidement traduite en accroissement de charge de travail, risques de perte d'emploi, et perte d'autonomie par les principaux intéressés (les techniciens) dans le choix des incidents à traiter. Ils ne perçurent pas les avantages pourtant prévus dans le projet :
Envoyer le bon technicien, avec les bonnes compétences techniques et les pièces détachées nécessaires pour lui éviter des visites répétées aussi frustrantes pour lui que le client, la possibilité pour lui de refuser une assignation proposée pour enrichir le système d’assignation automatique (en particulier sur les estimations de temps de trajet)... Hors, ce sont précisément les techniciens de maintenance qui pouvaient faire du projet un succès ou un échec. De plus, les responsables de clientèle qui auraient facilement compris et pu expliquer les bénéfices à leurs clients furent oubliés dans la communication.

Après une période initiale très réussie de tests en situation réelle survinrent les inévitables premiers problèmes. Les responsables de clientèles supportèrent alors la fronde des techniciens car ils ne percevaient pas les bénéfices pour eux-mêmes de cette nouvelle solution (satisfaction client, coûts de support réduits et donc prix plus attractifs à venir…).

Ceci aboutit à l'abandon pur et simple du projet.

D'où cette leçon à retenir sur la nécessité pour le chef de projet d'acquérir cette capacité à savoir communiquer une vision claire afin d'accroître son leadership et de n'oublier personne dans sa communication.